quinta-feira, 18 de abril de 2019

Notre-Dame : des politiques appellent Macron à ne pas "défigurer" la cathédrale / ÉDITORIAL Le Monde: Notre-Dame : pour une cathédrale du XXIe siècle



Notre-Dame : des politiques appellent Macron à ne pas "défigurer" la cathédrale

Par LEXPRESS.fr avec AFP ,
publié le 18/04/2019 à 15:49

Le chef de l'État souhaite que la reconstruction de la cathédrale s'accompagne d'un "geste architectural contemporain". L'opposition s'inquiète.
La reconstruction de Notre-Dame de Paris n'a pas encore commencé, mais elle fissure déjà l'union nationale des responsables politiques. En cause : la volonté d'Emmanuel Macron de rebâtir l'édifice dans les cinq ans et qu'"un geste architectural contemporain puisse être envisagé".

L'emploi du terme "contemporain" suscite la colère d'une partie de l'opposition, qui craint que la cathédrale soit défigurée. À gauche, Raphaël Glucksmann, tête de liste PS-Place publique pour les européennes, a estimé sur Public Sénat que "ce n'est pas le président de la République qui va décider du temps que prend un chantier", appelant à reconstruire sans "détruire l'âme de Notre-Dame".

La présidente du Rassemblement national Marine Le Pen a relayé le hashtag "#TOUCHEPASANOTREDAME", face aux pistes évoquées par le Premier ministre Édouard Philippe pour une éventuelle reconstruction de la flèche effondrée.

"Manie de la disruption"
"Ils vont nous faire des rooftops [toits-terrasses] au-dessus de Notre-Dame ?!", a lancé sur LCI Jordan Bardella, tête de liste du RN pour les élections européennes. "Il faut arrêter un peu le délire : on doit le respect absolu au patrimoine des Français." Souhaitant que la cathédrale soit reconstruite "à l'identique", il a rejeté toute idée de faire "une espèce de truc d'art contemporain, d'art moderne".

Pour François-Xavier Bellamy, tête de liste du parti Les Républicains pour les européennes, "nos gouvernants devraient retrouver un peu d'humilité". "Cette restauration est la mission des architectes formés pour cela, des artisans et des compagnons (...) Un président n'a d'autre responsabilité que de leur donner les moyens de réussir cette mission", a-t-il écrit dans une série de messages postés sur Twitter.

"Avant de nous proclamer bâtisseurs, reconnaissons que nous sommes d'abord héritiers... Il serait tragique qu'au deuil de la destruction succède la manie de la disruption, et que l'orgueil du 'nouveau monde' dénature maintenant le meilleur de l'ancien au lieu de le transmettre", a ajouté l'élu de Versailles.

Wauquiez veut une reconstruction à l'identique
À un article du Parisien demandant s'il faut reconstruire Notre-Dame à l'identique, le patron de LR, Laurent Wauquiez, a laconiquement répondu dans un tweet : "oui". "Ne laissons pas [la] mégalomanie [d'Emmanuel Macron] défigurer notre cathédrale !", a de son côté réagi Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, en appelant à signer une pétition pour "rebâtir Notre-Dame telle que nous en avons hérité".

En choisissant le délai rapide de cinq ans pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris et en faisant appel à un "concours international d'architecture" pour sa flèche, Emmanuel Macron a déclenché des critiques l'accusant de favoriser un projet qui trahirait sa construction originale.

Le délai a été jugé "réalisable" par plusieurs participants à une réunion avec Emmanuel Macron mercredi pour le "lancement de la reconstruction", même s'il est considéré trop court par certains experts extérieurs. Le débat fait rage entre ceux qui veulent reconstruire à l'identique et ceux qui prônent l'utilisation de matériaux modernes comme le titane pour la toiture ou une architecture plus contemporaine de la flèche.

Notre-Dame : pour une cathédrale du XXIe siècle

ÉDITORIAL
Le Monde

Editorial. Après l’injonction à reconstruire la cathédrale en cinq ans d’Emmanuel Macron, le débat est vif entre anciens et modernes. Osons trancher pour magnifier l’esprit de l’édifice.Publié hier à 10h38   Temps de Lecture 2 min.

Editorial du « Monde ». Après le temps de la catastrophe, de la sidération et de l’émotion planétaire, voici venu celui des questions, des spéculations et des controverses dont on raffole sous les cieux parisiens. Il aura suffi pour cela de deux initiatives du pouvoir politique.

Dès le lendemain de l’incendie qui a ravagé la cathédrale de Paris le 15 avril, le président de la République, Emmanuel Macron, a pris cet engagement solennel : « Je veux que Notre-Dame soit rebâtie plus belle encore d’ici cinq années. » Et, mercredi 17 avril, le premier ministre, Edouard Philippe, a engagé cette course contre la montre : d’une part, un projet de loi sera déposé très rapidement afin de donner un cadre légal aux dons qui affluent de toute part pour financer la restauration, d’autre part, un concours international d’architectes va être lancé pour décider de reconstruire ou non, et sous quelle forme, la flèche de la cathédrale, disparue dans le brasier.

Aussi légitime soit-il dans son principe et son intention, le volontarisme présidentiel a déclenché, dans l’instant, interrogations et polémiques. Comment Emmanuel Macron peut-il, urbi et orbi, fixer un calendrier aussi ambitieux, alors que l’impératif immédiat est de protéger et de sécuriser le bâtiment, et alors que les experts en tout genre commencent à peine à faire l’état des lieux et des dommages causés par le sinistre ?

Ces opérations complexes, mais décisives, pour la conception même de la restauration future, peuvent prendre des mois, plus vraisemblablement des années. Si l’engagement de l’Etat est salutaire, la précipitation, objectent déjà bien des experts, pourrait être mauvaise conseillère et abusivement préjuger des choix architecturaux et des solutions techniques qui seront retenues.

Faut-il restaurer la « forêt » ?
Sans attendre, une autre question a immédiatement embrasé tout le Landerneau des architectes, des experts des monuments historiques et des entreprises spécialisées : faudra-t-il restaurer Notre-Dame à l’identique, est-ce possible et souhaitable ? Eternelle querelle des anciens et des modernes, des conservateurs et des innovateurs, des prudents, voire des frileux, contre les audacieux, voire les iconoclastes. Parce que c’est un édifice unique, si chargé d’histoire et si profondément inscrit dans le paysage parisien, les prudents exigent de le restituer tel qu’il était à la veille de l’incendie. Pour les autres, cela reviendrait à s’imposer des contraintes absurdes quand l’occasion stimulante est offerte de dessiner une nouvelle cathédrale.

Entre mille autres questions, le débat se concentre, dès à présent, sur la charpente et la flèche. Faut-il restaurer la première, dont la « forêt » de poutres séculaires est partie en fumée, avec une nouvelle structure en bois, ou opter pour des techniques modernes, comme on le fit au XIXe siècle à Chartres, avec des poutrelles en fonte, dans l’entre-deux-guerres à Reims, avec des éléments en béton armé, ou à Metz, avec une structure métallique ? Quant à la flèche, rajoutée de façon intempestive au XIXe siècle par Viollet-le-Duc, convient-il de la restaurer à l’identique, d’en inventer une nouvelle ou carrément de la supprimer ?

Osons trancher ! Comme toutes ses semblables, Notre-Dame n’est pas un patrimoine figé. Depuis des siècles s’y sont sans cesse superposés les styles et les empreintes, dictés par les choix architecturaux et techniques du moment. L’essentiel, dans tous les sens du terme, est d’en préserver et d’en magnifier l’esprit.

Le Monde

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