Manuel
Valls précise les contours du « pacte » qu’il veut construire
avec l’islam de France
Le Monde.fr avec AFP
| 31.07.2016 à 04h42 • Mis à jour le 31.07.2016 à 05h34
Si le premier
ministre Manuel Valls constate que « l’islam a trouvé sa place
dans la République », « face à la montée du djihadisme », il y
a, selon lui, « urgence » à « bâtir un véritable pacte » avec
la deuxième religion de France, via « la Fondation pour l’islam
de France », explique-t-il dans une tribune publiée le 31 juillet
dans Le Journal du dimanche.
« L’islam a
trouvé sa place dans la République (…) contrairement aux attaques
répétées des populismes, à droite et à l’extrême droite »,
qui ont mis cette religion au « cœur de leur rhétorique du bouc
émissaire », déclare M. Valls. Et d’assurer : « Ce rejet
insupportable de l’islam et des musulmans, ces paroles, ces actes,
tout comme les paroles et les actes antisémites, antichrétiens,
doivent être combattus – et ils le sont – avec la plus grande
force. »
Pour autant, après
les récents attentats de Nice, le 14 juillet, et de
Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime), le 26 juillet, le chef de
gouvernement appelle à « un devoir de lucidité face à la montée
de l’islamisme et du djihadisme mondialisé avec sa vision
apocalyptique », qui prend « en otages de nombreux musulmans de
France ».
Lire aussi :
Manuel Valls : « Il y a une ligne infranchissable, l’Etat de droit
»
« Ceux qui minent
l’islam de l’intérieur »
« Tous les
salafistes ne sont pas des djihadistes… mais presque tous les
djihadistes sont des salafistes. Cette mécanique infernale pousse
des individus par centaines, parfois très jeunes – hommes, femmes,
de culture musulmane ou convertis de fraîche date – à prendre les
armes et à les retourner contre leur pays », insiste-t-il.
Soulignant la «
mobilisation sans précédent des pouvoirs publics » dans la lutte
contre « la radicalisation », il juge que la France « doit faire
au monde entier la démonstration éclatante que l’islam est
compatible avec la démocratie ».
M. Valls, qui s’est
dit, vendredi, dans le journal Le Monde, « favorable » à une
interdiction temporaire du financement étranger des mosquées,
rappelle qu’il « y a plus de dix ans, une fondation, [la Fondation
pour l’islam de France], a été créée pour réunir en toute
transparence les fonds nécessaires ».
« Son échec est
total. Il ne doit pas nous décourager. Il faut reconstruire une
capacité de financement française », martèle-t-il.
« Il y a urgence à
aider l’islam de France à se débarrasser de ceux qui le minent de
l’intérieur. Pour cela, il nous appartient de bâtir un véritable
pacte avec l’islam de France, donnant à la Fondation une place
centrale », ajoute le chef du gouvernement.
Appel d’une
quarantaine de personnalités musulmanes
Dans un appel à «
agir » contre « l’islamisme radical », intitulé « Nous,
Français et musulmans, sommes prêts à assumer nos responsabilités
» et publié dans le JDD, une quarantaine de personnalités dont le
philosophe Abdennour Bidar, l’essayiste Hakim El Karoui et la
sénatrice socialiste de Paris Bariza Khiari se disent « concernés
par l’impuissance de l’organisation actuelle de l’islam de
France, qui n’a aucune prise sur les événements ».
Préconisant de «
changer de générations » et de mener « la bataille culturelle
contre l’islamisme radical, auprès des jeunes et des moins jeunes
», ils soulignent eux aussi qu’« il est temps » de « réactiver
» la Fondation pour l’islam de France, qui « n’a jamais
fonctionné », et de « lui donner la capacité de collecter des
ressources ».
La relance de cette
fondation devait être l’un des chantiers prioritaires du « plan
islam », annoncé au lendemain des attentats de janvier 2015 par le
gouvernement. Une première version, la Fondation des œuvres de
l’islam de France (FOIF), créée en 2005 par Dominique de
Villepin, à l’époque ministre de l’intérieur, s’est soldée
par un échec.
« Tarir les
financements extérieurs »
A l’époque, Serge
Dassault, ancien maire de Corbeil-Essonnes avait même fait un don de
deux millions d’euros à la structure. L’édile en sera, en
réalité, l’unique donateur puisque la FOIF, aussitôt créée,
s’est enfoncée dans des querelles de leadership.
Dans sa tribune,
Manuel Valls, tout en refusant « toute tentation néoconcordataire
», qui « serait une insulte à la laïcité », juge qu’il faut «
revoir certaines règles pour tarir les financements extérieurs et
accroître en compensation les possibilités de levées de fonds en
France ». « Tout devra être mis sur la table, avec les musulmans
de France et leurs instances représentatives », précise-t-il.
Car, prévient le
premier ministre, « si l’islam n’aide pas la République à
combattre ceux qui remettent en cause les libertés publiques, il
sera de plus en plus dur pour la République de garantir ce libre
exercice du culte ». « Il faudra un engagement massif et puissant.
D’abord, des musulmans. Et je les appelle à agir dans leur
famille, leur quartier. »
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