Le
président Erdogan favorable à la peine de mort « si le peuple le
veut »
LE MONDE |
07.08.2016 à 23h49 • Mis à jour le 08.08.2016 à 10h34 | Par
Marie Jégo (Istanbul, correspondante)
A Yenikapi, dimanche
7 août, le littoral de la mer de Marmara n’était plus qu’une
bande rouge, constituée d’une nuée de drapeaux turcs brandis par
les manifestants – plus d’un million – venus participer, à
l’appel du président Recep Tayyip Erdogan, au « rassemblement de
la démocratie et des martyrs ».
Deux leaders de
l’opposition, Kemal Kilicdaroglu, le secrétaire général du Parti
républicain du peuple (CHP, kémaliste, social-démocrate) et Devlet
Bahceli, le chef du Parti de l’action nationaliste (MHP,
ultra-nationaliste) s’étaient joints au mouvement. En revanche le
parti pro kurde HDP, troisième force au Parlement, n’avait pas été
invité.
L’étendard
national était partout : roulé sous le bras des voyageurs dans le
métro bondé, ceint sur les fronts des fervents patriotes, porté en
mode « cape » par les femmes en tchadors noirs, décliné en
maillots de corps et en casquettes pour les enfants.
Peine de mort
Organisé trois
semaines après la tentative de putsch, le rassemblement était perçu
comme le point de départ d’une « nouvelle Turquie », plus unie,
plus forte, comme l’a rappelé M. Kilicdaroglu, le chef de file des
kémalistes, depuis la scène géante où trônaient, avec une
symétrie parfaite, le portrait de Mustafa Kemal dit Atatürk, le
fondateur de la République, et celui du président Erdogan.
C’est surtout ce
dernier qu’une large partie du public attendait, avec une
impatience non contenue. Son programme ? Le rétablissement de la
peine de mort, si souvent réclamé par les manifestants de l’après
tentative de putsch, lors de leurs rassemblements quotidiens en
soirée sur les places centrales des grandes villes.
« Si le Parlement
accepte de réintroduire la peine de mort, je l’adouberai », a
lancé M. Erdogan à l’adresse de la foule qui n’attendait que
cela. « Si le peuple le veut, je pense que les partis politiques
l’accepteront eux aussi », a-t-il insisté, rappelant que la peine
de mort était en vigueur en Turquie avant 1984.
Purges unanimes
Lors du «
rassemblement de la démocratie et des martyrs » organisé à
Istanbul, le 7 août.
Une grande partie
des manifestants approuvent ce genre de déclarations. Le châtiment
suprême est réclamé pour les putschistes. « Ils ont tué des
innocents, ils le méritent », explique Murat – il ne veut pas
donner son nom de famille –, un ouvrier de 50 ans venu au
rassemblement avec son fils de 15 ans.
Tant qu’à faire,
Murat voudrait bien voir le prédicateur religieux Fethullah Gülen,
décrit par les autorités comme l’instigateur du soulèvement,
puni de la peine de mort lui aussi. « Chacun doit le savoir, le chef
de ce groupe terroriste reviendra en Turquie et paiera pour ce qu’il
a fait », a clamé le premier ministre Binali Yildirim, répondant
aux attentes du public. M. Gülen réside aujourd’hui aux
Etats-Unis.
Les purges en cours
contre ceux qui sont présentés comme les adeptes de la confrérie
güleniste – 18 000 interpellations, 60 000 mises à pied – font
l’unanimité parmi la classe politique. « Cette organisation
terroriste a prospéré au sein de l’armée et à tous les niveaux
de l’Etat », a souligné Kemal Kilicdaroglu, tandis que le chef
des ultra-nationalistes, Devlet Bahceli, qualifiait la confrérie de
« cancer », conformément à la terminologie en vigueur.
Le président
Erdogan pour sa part a insisté sur le fait qu’il fallait davantage
nettoyer les institutions d’Etat des griffes de la confrérie,
laissant entrevoir de nouvelles vagues de purges.
|
Sem comentários:
Enviar um comentário